Le Dernier Duel – Ridley Scott en grande forme – Critique

Au fil des années, la carrière de Ridley Scott se poursuit. En effet, le réalisateur britannique est de retour avec un nouveau film: Le Dernier Duel. Adapté de faits réels, ce long-métrage se présentait comme une épopée médiévale, portée par un impressionnant casting (Matt Damon, Ben Affleck, Adam Driver). Et le résultat: un excellent film, qui montre que même à 83 ans, Ridley Scott a encore quelques flèches à son arc.

Le long-métrage se base sur des faits réels survenus en 1386 pour raconter l’histoire du dernier duel judiciaire dans le royaume de France. Ce combat oppose le chevalier Jean de Carrouges (Matt Damon) et l’écuyer Jacques Le Gris (Adam Driver). La source du conflit: la femme de Carrouges, Marguerite (Jodie Comer), accuse Le Gris de l’avoir agressée sexuellement. Mais celui-ci se prétend innocent. Afin de déterminer qui dit la vérité, un combat à mort entre les deux hommes est organisé. Si Carrouges meurt, sa femme sera brûlée vive pour accusation mensongère…

Un cinéaste mythique

Ridley Scott est un cinéaste qui a de nombreuses fois marqué l’histoire du cinéma. Sa filmographie contient de nombreux films marquants, comme Blade Runner, Alien, ou encore Gladiator. Cependant, si Scott est capable du meilleur, il est également capable du pire. Car ces dernières années, il a enchaîné les projets décevants (Prometheus, Alien Covenant, Exodus: Gods and Kings). Néanmoins, Le Dernier Duel m’intriguait fortement, grâce à des bandes-annonces très réussies et un casting cinq étoiles.

Et je n’ai pas été déçu. Le Dernier Duel est une expérience de cinéma fascinante.

Une joute tragique

Dès le début du film, le ton est donné. Dans une vaste arène, Jean de Carrouges et Jacques Le Gris se font face, lourdement armés. Le combat qui va suivre sera décisif, se terminant par la mort de l’un d’entre eux. La vérité du gagnant prévaudra. Mais, alors que les personnages s’apprêtent à croiser le fer, le film nous ramène en arrière, afin d’aller explorer les événements qui ont mené à cette funeste joute.

Trois versions d’une même histoire

Dès lors, le film adopte une structure en trois chapitres. Chaque chapitre va épouser le point de vue d’un des trois protagonistes principaux, pour relater leur vision personnelle des événements qui ont mené au duel. Il y avait un vrai risque avec cette démarche: celui d’ennuyer le spectateur en lui racontant plusieurs fois les mêmes péripéties. Heureusement, le film peut s’appuyer sur un script solide, écrit par Matt Damon, Ben Affleck et Nicole Holofcener.

Dans leur processus de travail, les scénaristes se sont répartis l’écriture des différents chapitres:

• Matt Damon a écrit le chapitre concernant le personnage qu’il interprète, Jean de Carrouges.
• Ben Affleck a écrit le segment consacré au personnage de Jacques le Gris, incarné par Adam Driver.
• Et enfin, la scénariste Nicole Holofcener a écrit le point de vue de Marguerite de Carrouges.

Avec ce triple regard sur cette histoire d’accusation, les perceptions des protagonistes se confrontent. Et ce conflit grandissant confère au récit une grande puissance émotionnelle. La grande force du film est de réussir, à chaque chapitre, à donner une vision différente de chaque personnage principal. Ainsi, au fil du long-métrage, les protagonistes prennent de l’épaisseur et bénéficient d’une écriture de plus en plus nuancée.

Qui est l’antagoniste?

L’écriture du scénario apparaît d’autant plus soignée quand il s’agit de désigner l’antagoniste du long-métrage. Là où de nombreux films se seraient contentés de désigner le violeur comme le « méchant », le personnage à abattre lors d’un ultime duel, le long-métrage de Scott nuance le propos. En effet, la multiplicité des points de vue amène une complexité très appréciable, où le violeur est légitimement convaincu que ce qu’il a fait n’est pas un viol, mais un crime d’adultère. Il ne nie donc pas les accusations de viol à son égard par mensonge, mais par vraie conviction. Au lieu de présenter le personnage de Jacques Le Gris comme unique coupable, Scott dresse le portait d’une société médiévale qui encourage ce genre de comportements. Le problème serait donc plus systémique qu’individuel.

Et c’est là que le personnage le plus important se dévoile, celui de Marguerite de Carrouges, excellemment incarnée par Jodie Comer. Alors qu’elle cherche à faire entendre sa vérité, cette protagoniste va se confronter à un système médiéval où l’ignorance et les idées préconçues règnent. La fin du film, très chargée émotionnellement, ne laissera personne indifférent.

D’excellents acteurs

L’excellent scénario du film est grandement soutenu par les excellentes performances du casting. Qu’il s’agisse de Matt Damon, Adam Driver, Jodie Comer ou du reste de l’équipe, tout le monde tire son épingle du jeu.

La réalisation de Ridley Scott est magnifique, et sublime le scénario par une mise en scène très travaillée. Du côté de la musique, le compositeur Harry Gregson-Williams, fréquent collaborateur de Scott, livre une partition qui contribue à l’ambiance du film.

Le Dernier Duel est donc une grande réussite. Avec ce film, Ridley Scott revient en force. Car tout y est: des acteurs au sommet, un scénario malin et une mise en scène sublime. Malheureusement le long-métrage n’a pas vraiment trouvé son public. Avec un budget de 100 millions, il n’a pour le moment récolté que 23 millions de dollars au box-office mondial. Le Dernier Duel est donc un flop commercial pour Scott. Néanmoins, le cinéaste va vite revenir en salles, puisque son prochain film, House of Gucci, sortira le 24 novembre prochain.