Last Night in Soho – Les fantômes du passé – Critique

par | Nov 8, 2021 | Critiques

Edgar Wright est un réalisateur dont j’aime énormément le travail. Au fil de sa carrière, le cinéaste britannique a accompli une prouesse peu commune: séduire un large public à la seule force de son style. En effet, ses films (Shaun of the Dead, Hot Fuzz, Baby Driver) ont marqué toute une génération de spectateurs. J’attendais donc avec impatience son nouveau long-métrage, Last Night in Soho, qui s’est révélé être l’une des expériences cinéma les plus intenses de l’année.

Le style d’Edgar Wright

En 2004, Shaun of the Dead, second film d’Edgar Wright, sort en salles. Son succès révèle au monde un cinéaste avec une forte identité. Avec des longs-métrages aux montages survoltés, où l’humour arrive à côtoyer naturellement la tragédie, Wright surprend, et fait sensation. Sa connaissance encyclopédique du cinéma, associée à son grand talent pour la mise en scène, lui permettent de s’installer rapidement dans le paysage cinématographique international.

Au-delà de son style visuel, le cinéma d’Edgar Wright est marqué par des thématiques récurrentes. Dans ses films, le réalisateur met souvent en scène des personnages qui ne se sentent pas à leur place, déphasés avec l’époque où ils vivent. Mélancoliques, ils mettent le passé sur un piédestal. Wright aborde donc de nombreuses fois les dangers de la nostalgie à travers les arcs scénaristiques de ses personnages, qui ont du mal à vivre autrement que dans l’ombre de leur passé.

Avant Last Night in Soho, Wright s’était amusé à jouer avec les codes du film d’action et de la comédie. Mais dans ce nouveau long-métrage, le cinéaste change complètement de registre, puisqu’il explore cette fois les codes du film d’horreur.

Affiche du film Last Night in Soho, d'Edgar WrightLast Night in Soho raconte l’histoire d’Éloïse (Thomasin McKenzie), une jeune femme passionnée de mode et de design. Alors qu’elle déménage à Londres (dans le quartier de Soho) pour faire ses études, elle découvre que chaque nuit, lorsqu’elle s’endort, elle est transportée dans les années soixante. Si cette époque semble à première vue idyllique pour la jeune femme, loin des tracas de sa vie contemporaine, les choses vont vite se gâter. Car ce Londres idéalisé n’est pas ce qu’il paraît, et le rêve va se transformer en cauchemar…

Un voyage dans le temps

Si Wright transporte son héroïne dans un Londres d’abord moderne, puis l’emmène ensuite dans les années soixante, il en est de même pour le spectateur. En effet, la réalisation du cinéaste fait une nouvelle fois des merveilles et nous emporte dans un récit captivant. Le quartier de Soho prend alors vie devant nos yeux, dans sa beauté comme dans sa noirceur. La photographie, magnifique, se révèle vite hypnotisante. Chaque image semble être là pour marquer la rétine du spectateur.

La nostalgie destructrice

En permettant à son héroïne de revisiter le Soho des années 60, Wright aborde une nouvelle fois la thématique du recours à la nostalgie. Il montre d’abord la joie de la protagoniste, qui a l’impression de découvrir un monde idéal. Tout semble parfait et l’avenir apparaît comme radieux dans cette projection du passé. Mais, à force de prolonger sa présence dans ce doux rêve, elle en découvre les limites. De manière très dure, Last Night in Soho montre l’impossibilité de vivre dans un souvenir figé, qui ne va jamais durer bien longtemps. Au fil du film, le spectateur voit la protagoniste devenir de plus en plus obsédée par le passé, alors que son rêve tourne à l’horreur. La vie était-elle réellement mieux avant? « Certainement pas! », nous répond Edgar Wright.

Image du film Last Night in Soho, avec Thomasin McKenzie

De plus, en dehors de sa prouesse technique admirable et de son histoire poignante, Last Night in Soho peut compter sur un casting tout simplement merveilleux, pleinement investi dans le projet de Wright.

Du côté de la musique, le film alterne entre des chansons des années 60 et des compositions originales de Steven Price. Si le début du long-métrage consiste à recréer un passé radieux, la suite, bien plus sombre, va compter sur la bande originale de Price pour amener au spectateur un sentiment de malaise et de mélancolie.

Un scénario solide, mais quelques faiblesses

Le scénario a été co-écrit par Edgar Wright et Krysty Wilson-Cairns. Cette dernière était déjà à l’oeuvre sur le script du 1917 de Sam Mendes. Dans sa globalité, le scénario est plutôt solide, avec une intrigue aux nombreux retournements de situation. En revanche, il souffre de quelques faiblesses, comme des personnages secondaires sous-développés, qui ne donnent l’impression d’être là que pour faire avancer l’histoire. De plus, le film fait parfois trop apparaître ses mécaniques scénaristiques, ce qui permettra à certains d’anticiper certains twists bien avant qu’ils n’arrivent. Néanmoins, cela n’a pas été mon cas. L’émotion et la tension étant au coeur du récit, je me suis laissé porter, subjugué par la virtuosité du long-métrage.

Last Night in Soho est donc un film qui m’a profondément touché. Edgar Wright s’approprie les codes du cinéma d’horreur pour montrer les dérives de la nostalgie. Transporté dans un monde à la fois magnifique et terrifiant, le spectateur ne restera pas indifférent devant ce récit fascinant.

Fiche d'informations du film

Affiche de Last Night in Soho, nouveau film d'Edgar WrightTitre : Last Night in Soho

Genres : Horreur, Épouvante, Thriller

Réalisateur : Edgar Wright

Scénaristes : Edgar Wright, Krysty Wilson-Cairns

Acteurs : Thomasin McKenzie, Anya Taylor-Joy, Matt Smith

Photographie : Chung-hoon Chung

Musique : Steven Price

Durée : 1h57

Date de sortie : 27 octobre 2021

François Pintado

Rédacteur

Le cinéma est une de mes grandes passions. Je prends plaisir à écrire pour donner mon point de vue sur différents sujets propres à ce domaine, comme les films et l’industrie qui les entoure.

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