Faire revivre les succès passés. C’est l’idée-clé à laquelle s’accroche Hollywood. Ramener sur le devant de la scène des sagas cultes, pour en proposer de nouvelles suites ou extensions en tout genre. C’est dans ce contexte que sort Indiana Jones et le Cadran de la destinée. Il s’agit du cinquième volet de la saga initiée en 1981 par Steven Spielberg et George Lucas. Mais à la barre de ce nouvel opus ne subsiste aucun des créateurs originaux. C’est le réalisateur James Mangold qui a la dure mission de succéder à Spielberg. Malheureusement, le résultat est peu convaincant.
La naissance d’un personnage iconique: Indiana Jones
La naissance du personnage d’Indiana Jones est venue de la collaboration entre deux personnes: George Lucas et Steven Spielberg. En 1977, les deux amis prennent des vacances à Hawaï, au moment de la sortie de Star Wars. Ils discutent, et Spielberg évoque son envie de faire un film James Bond. Lucas lui propose alors autre chose: raconter l’histoire d’un autre personnage: Indiana Smith. Emballé, Spielberg accepte. Le projet va ensuite évoluer, et Indiana Smith va devenir Indiana Jones.
C’est donc en 1981 que le monde découvre Indiana Jones et les aventuriers de l’arche perdue. Pour un budget de 20 millions de dollars, le film en rapporte 389 millions. Succès public et critique, le long-métrage a marqué l’imaginaire collectif. Il suffit de voir l’ombre du personnage avec son chapeau iconique et quelques notes du thème de John Williams pour le reconnaître d’emblée.
Dans une scène d’introduction mémorable, Indiana Jones explore avec prudence la jungle et un temple. Malin, l’archéologue déjoue un à un les pièges meurtriers de l’endroit, pour récupérer une relique. Cependant, la suite ne va pas se passer comme prévu. Jones se retrouve dans une situation de vie ou de mort, qu’il va surmonter grâce à ses compétences… et beaucoup de chance. Cette excellente séquence résume d’ailleurs bien le film, et par extension, le reste de la saga. Car Indiana Jones semble avoir un don pour se mettre dans les pires situations possibles. Cependant, il n’abandonne jamais, faisant preuve d’une ténacité hors norme dans ses aventures.
Comme toujours, le succès du film a motivé la production de suites. Ainsi arrivent Indiana Jones et le temple maudit (1984) et Indiana Jones et la dernière croisade (1989). Une trilogie solide, regorgeant de moments de comédies qui font mouche, de scènes d’action inventives (portées par l’implication d’Harrison Ford), et d’un John Williams toujours prêt à décupler l’émotion avec ses compositions.
La déception du quatrième opus
La saga aurait pu en rester là. Mais George Lucas et Steven Spielberg reviennent aux affaires en 2008 avec la sortie d’un quatrième opus: Indiana Jones et le royaume du crâne de cristal.
Pour beaucoup, cet opus déçoit grandement. Si la première heure est plutôt réussie, le long-métrage semble ensuite se précipiter vers son final, laissant de côté ses personnages pour des scènes d’action mal exécutées. Ces dernières, intéressantes sur le papier, sont gâchées par des images de synthèse de qualité douteuse. Malgré cette déception publique et critique, le film est un grand succès au box-office, atteignant les 790 millions de dollars de recettes.
Une suite est alors envisagée, mais sa mise en production va traîner.
Rachat de Lucasfilm par Disney
Septembre 2012. Pour un montant de 4 milliards de dollars, Disney rachète Lucasfilm, obtenant les droits des franchises du studio (Star Wars et Indiana Jones). Bien sûr, le but de Disney est de pouvoir continuer à capitaliser sur ces franchises extrêmement lucratives.
Pendant ce temps, les discussions autour d’un Indiana Jones 5 continuent. À ce moment là, Spielberg est toujours rattaché à la réalisation de ce volet. Les versions de scénario s’enchaînent, sans réussir à mettre tout le monde d’accord. Spielberg finit par quitter le projet en février 2020.
Il est ensuite remplacé par James Mangold (Le Mans 66, Logan), qui va s’attaquer à une nouvelle version du script avec ses coscénaristes Jez et John-Henry Butterworth.
Il faut donc attendre juin 2023 pour la sortie du film en salles.
Que vaut Indiana Jones et le Cadran de la destinée?
Le film s’ouvre sur ce qui est sûrement sa meilleure séquence. On retrouve donc Indiana Jones en 1945, alors qu’il s’efforce d’empêcher les nazis de voler une précieuse relique. Le long-métrage nous montre donc une version d’Harrison Ford jeune, grâce à une technologie de de-aging. Si l’effet n’est pas parfait, la séquence est très divertissante, rappelant un instant l’inventivité de Spielberg dans les scènes d’action des précédents films.
Après cette introduction, on retrouve Indiana Jones à la fin des années 60, alors qu’il s’apprête à prendre sa retraite. Mais la situation change après la visite de sa filleule Helena Shaw (Phoebe Waller-Bridge), à la recherche d’un artefact rare : le cadran d’Archimède. Cet appareil aurait le pouvoir de localiser les fissures temporelles…
Des intentions contradictoires
Ce n’est sûrement pas un hasard que James Mangold ait été choisi pour réaliser ce cinquième opus. Dans Logan (2017), le réalisateur filmait déjà un Wolverine vieillissant, au crépuscule de sa vie. Émouvant, le film réussissait avec brio à clôturer le parcours d’un personnage emblématique.
Dans Indiana Jones 5, Mangold traite du temps qui passe en mettant Jones dans un monde qui va toujours plus vite, et qu’il comprend de moins en moins. Le légendaire archéologue est-il lui-même devenu une relique, tout juste bonne à prendre la poussière dans un musée?
Aborder le passage inéluctable du temps est donc une idée intéressante. Malheureusement, Mangold semble ne pas pouvoir aller au bout de sa démarche à cause d’une autre intention: retrouver la magie des premiers films.
Et cette deuxième volonté pose problème. Car montrer un Indiana Jones vieillissant implique que certaines choses ne pourront plus se dérouler, ou être filmées comme avant. D’ailleurs, les scènes d’action de ce cinquième volet déçoivent. En choisissant de tourner ces séquences de la même façon que celles des premiers opus, le long-métrage montre qu’il n’arrive plus à en recréer des équivalents convaincants. En plus d’illustrer un vrai manque de créativité dans leur conception, elles semblent artificielles, dopées aux images de synthèse. Plus visible que jamais, la doublure numérique d’Harrison Ford illustre bien malgré elle le passage du temps.
Focalisé sur la recréation du passé, le film croule sous un cahier des charges conséquent, avec les inévitables passages obligés de la saga. Résultat: le rythme en pâtit méchamment, la faute à un scénario qui multiplie les longueurs.
Avec un énorme budget proche de 300 millions de dollars, cette suite n’a récolté que 260 millions dans le monde entier. En définitive, c’est un échec cuisant au box-office pour Disney.
Est-ce le dernier tour de piste de l’archéologue? On l’espère. Partagé entre son envie de raconter la dernière histoire d’un Indiana Jones vieillissant et celle de renouer avec la magie des premiers films, cette suite ne choisit jamais et rate le coche.
Fiche technique du film
Titre : Indiana Jones et le Cadran de la destinée
Titre original : Indiana Jones and the Dial of Destiny
Genres : film d’action, film d’aventure
Réalisateur : James Mangold
Scénaristes : Jez Butterworth, John-Henry Butterworth, David Koepp, James Mangold
Acteurs : Harrison Ford, Phoebe Waller-Bridge, Mads Mikkelsen
Photographie : Phedon Papamichael
Musique : John Williams
Durée : 2h34
Date de sortie : 28 juin 2023