Oxygène – Alexandre Aja et le défi du huis clos – Critique

Ce mois de mai 2021 marque le retour d’Alexandre Aja. En effet, ce réalisateur français revient avec une production Netflix: Oxygène. Il s’agit d’un huis clos où une femme est coincée dans une capsule cryogénique, où l’oxygène se raréfie. Un film prenant, mais pas sans défauts.

Une jeune femme (Mélanie Laurent) se réveille seule dans une capsule cryogénique. Ayant perdu la mémoire, elle ne sait pas comment elle a pu finir enfermée dans cet espace étroit. Mais le pire est à venir: l’oxygène commence à manquer…

Un film pas si français que ça…

Si Oxygène a été vendu par Netflix comme une production française, le projet vient au départ des États-Unis. En 2016, la scénariste américaine Christie Leblanc en écrit le scénario. Très vite, celui-ci est placé dans la blacklist (c’est à dire la liste des scénarios à haut potentiel, mais qui n’ont pas encore été produits). Au final, quelques années plus tard, le film est produit en France en 2020.

Alexandre Aja, l’expert du huis clos

Oxygène est un long-métrage qui fonctionne en huis clos. Il s’agit d’une technique de narration consistant à faire se dérouler l’action dans un lieu unique, où les personnages évoluent. Dans sa carrière, Alexandre Aja a eu plusieurs fois recours à ce procédé, notamment dans Haute Tension (2003) et Crawl (2019). Car celui-ci permet de se concentrer sur les personnages, et est très utile pour cacher un budget moindre.

Cependant, avec Oxygène, le cinéaste se lance un défi d’une autre ampleur. L’action se passe dans un lieu encore plus réduit (une capsule cryogénique), avec un seul personnage. Le challenge est donc à la fois narratif et visuel. Car maintenir l’intérêt du spectateur dans ces conditions très contraignantes n’est pas chose facile. Pour dépasser les limites de son concept, le scénario devra être capable de proposer des rebondissements variés pour éviter le sentiment de répétition. De son côté, la réalisation devra se révéler suffisamment inventive pour jouer avec le décor, et s’adapter aux besoins de l’histoire.

Après avoir visionné le long-métrage, force est de constater qu’Alexandre Aja et la scénariste Christie Leblanc s’en tirent avec les honneurs. Car Oxygène est un film très rythmé, au suspens redoutable.

L’immersion du spectateur

Dès l’ouverture, le spectateur se retrouve plongé, comme le personnage, dans la capsule cryogénique. Pourquoi? Comment? Le film y répondra plus tard, distillant un intrigant mystère.

La réalisation d’Aja, d’une redoutable efficacité, joue constamment avec le décor, et parvient même à faire oublier les limitations évidentes du concept de huis clos. De scène en scène, la réalisation s’adapte, pour servir au mieux l’histoire, ainsi que l’actrice principale, que la caméra ne quitte presque pas du regard.

Mélanie Laurent, très investie dans son rôle, est excellente. L’actrice incarne avec justesse ce personnage qui oscille entre plusieurs émotions (pertes de repère, moments de panique et maîtrise de soi). Elle avait la lourde mission de porter le film sur ses épaules, ce qu’elle fait avec brio. Son jeu renforce l’empathie qu’on a envers son personnage, et donne envie d’éclaircir les nombreux mystères du scénario à ses côtés. La mise en scène d’Aja nous fait d’ailleurs pleinement ressentir l’expérience du personnage, créant un sentiment de claustrophobie.

En ce qui concerne la musique, la bande originale composée par Rob est très bonne. Contribuant à l’ambiance très particulière d’Oxygène, elle tire son épingle du jeu avec quelques thèmes qui restent en tête après le visionnage.

De son côté, le scénario parvient à captiver jusqu’à la dernière minute. Afin de garder une tension permanente, le script a recours à de nombreux rebondissements, qui viennent bousculer les acquis des spectateurs concernant le déroulé de l’histoire. Au fil des péripéties et révélations très créatives, le film avance de manière très rythmée.

Des problèmes de scénario

Cependant, si les multiples rebondissements permettent de tenir le spectateur en haleine, le scénario finit par poser problème. En effet, plus le film avance, plus les incohérences et les facilités scénaristiques se multiplient. Cela gâche quelque peu l’expérience, car le récit paraît dès lors moins maîtrisé, montrant les limites du concept de départ.

Oxygène est donc un film qui réussit beaucoup de choses. Une tension constamment renouvelée, une réalisation inventive malgré un espace réduit, un excellent casting… Mais la fête est gâchée par les facilités et les incohérences que se permet le scénario pour faire avancer l’histoire. Je le recommande tout de même, car le long-métrage est une belle expérience d’angoisse et de tension.